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8 septembre 2007 6 08 /09 /septembre /2007 14:53




Rencontre avec Estelle Goutorbe, Historienne d'Art, pour sa chronique

"Secrets d'Ateliers" 

sur Radio RCF Isère.

Eté 2007

 
 
 Joël Bressand est sculpteur et graveur à Saint-Egrève (Isère). Il est également veilleur de nuit dans un centre d'hébergement.
Joël Bressand étudie aux Beaux-Arts de Grenoble dans les années 1970. Il se "remplit presque jusqu'à l'étouffement" dit-il, de culture et se spécialise en gravure. Mais il lui faut attendre une dizaine d'années, au cours desquelles il exerce d'autres métiers, pour véritablement laisser émerger sa création artistique.                                     
Sous forme de sculpture.   Il ne s'agit en fait que d'une longue maturation pour digérer tous ses acquis et exprimer toute cette poésie qu'il garde en lui depuis l'enfance. Car Joël Bressand a toujours porté un regard bien à lui sur les choses. Il a toujours collectionné des morceaux de bois, des cailloux, des coquillages, j'imagine conservés dans de multiples boîtes à souvenirs, que souvent l'âge adulte nous souffle de jeter... A regrets, avec l'impression de trahir l'enfant  que nous avons été. Joël Bressand, lui, a toujours conservé sa capacité d'émerveillement : toute promenade devient une chasse au trésor en forêt ou dans les granges abandonnées. Ustensiles de cuisine, vieux clous rouillés, ficelle, râpe à fromage, yeux de poupées, bois flottés très lisses ou souches tourmentées, rebuts plastiques, vieux fers à repasser....                    
L'artiste aime transformer. Pourvu que l'objet ait une forme, porteuse de création, il mérite alors de rejoindre ses comparses dans l'atelier. Pour un jour prendre vie dans un ensemble hétéroclite, qui trouve tout son sens entre les mains de l'artiste et aux yeux du spectateur. Joël Bressand m'explique :   " Souvent des formes s'associent des années après, un peu par hasard, comme je dis souvent elles se retrouvent dans l'atelier puis elles se rencontrent des fois à mon insu. Et des fois les sculptures sont dans mon esprit pendant des années et il suffit d'un élément que je trouve plus tard pour déclencher l'objet fini ".                                      Hérissés de poils de balais, nez terminés par une serpe, babines en gants de cuir, naissent alors des personnages ou animaux qui n'ont rien d'effrayant, bien au contraire... Derrière leur forme et leur nom se laisse aisément deviner une personnalité pleine d'humour et d'imagination, ouverte sur le monde des contes, de la bande dessinée et des Arts Premiers. Sur les étagères conversent en toute simplicité des Joachim du Balai, une tête de Poulinette, croisement d'une poule, d'une linotte et d'une moulinette, et autre Vénus ménagère qui dresse une louche en guise de tête.  

Alors, Joël Bressand compositeur plutôt que sculpteur? En tout cas un artiste singulier qui égrène au fil de son oeuvre une musique intérieure, pour le plus grand plaisir du spectateur.                                                                                                                    
Plus d'un, en sortant, doit se demander :  " et moi, où ai-je laissé mon enfance?"             Vous pouvez voir de ses oeuvres dans les jardins de la Casamaures, à Saint-Martin le Vinoux, et ceux de la bibliothèque Barnave, à Saint-Egrève.  Je vous recommande vivement d'aller visiter son blog : joel-bressand.over-blog.com Vous y découvrirez également des gravures très intéressantes. Vous pourrez ainsi prendre contact avec lui pour aller visiter sa salle d'exposition ouverte toute l'année sur rendez-vous.                                                                                                             
Estelle Goutorbe




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26 août 2006 6 26 /08 /août /2006 14:37



FESTIVAL DE BANNE 2003




Jeanine Rivais
 — Commençons par la question traditionnelle : Qui êtes-vous ? Que faites-vous ? Depuis quand êtes-vous artiste ?
Joël Bressand — Je viens de Sainte-Egrève près de Grenoble. Je vis donc depuis toujours très près de la nature. Et depuis toujours je suis fasciné par les formes naturelles, les matériaux naturels. Je suis grand récupérateur de morceaux de bois, de cailloux… en somme de tous les éléments naturels qui sont les matériaux de départ de ma création, auxquels j'intégre d'autres objets  de toute sorte.
Je ne travaille jamais dans la masse, à partir d’un bloc, je travaille toujours à partir d’une forme préexistante. Le point de départ détermine donc le sujet de l’œuvre.


J. R. — Peut-on dire alors que vous êtes non pas sculpteur, mais « compositeur » ? Et comment en êtes-vous venu à cette forme de création ?
J. B. — Comme je viens de le dire, j’ai depuis l’enfance, collectionné des objets trouvés dans la nature. Mais un jour, je suis parti aux Beaux-arts, je me suis rempli de culture et j’ai un peu oublié tous ces objets. J’ai beaucoup regardé, beaucoup lu. En fait, je me suis tellement gavé de cette culture, et de technique que je me suis un peu oublié moi-même. Ce n’est que dix ans après les Beaux-arts, dix ans que j’ai passés à ne rien faire, dix ans pendant lesquels je me suis heurté aux accidents de l’existence, à la mort de personnes proches, que je me suis repris. Et vers la trentaine, j’ai éprouvé le désir de faire enfin « quelque chose de ma vie ». C’est alors que je suis tombé sur toutes ces traces de l’enfance entassées dans le grenier ; et que j’ai commencé, comme beaucoup de Singuliers, à me rendre compte qu’avec eux, je pouvais créer des objets.
Pour revenir à votre remarque précédente, il y a quand même une partie de sculpture, parce que j’essaie au cours de l’élaboration, de prolonger (avec, d’ailleurs plus ou moins de bonheur), la forme de départ. Et je procède pour ce faire à l’assemblage de divers matériaux.


J. R. — Il me semble que vous ne travaillez que sur bois. Avec quelques ajouts de métal ici et là. Est-ce exact ?
J. B. — Il y a quelques exceptions, semelles de chaussures, etc. Mais la base est généralement le bois.
J. R. — Vous placez ensuite ces objets côte à côte, mais ils ne sont pas interdépendants. Vous n’essayez pas de faire des mises en scène ? Chaque œuvre est autonome, aucune ne peut pas être rattachée à une quelconque narration où plusieurs entreraient collectivement en ligne de compte, dans une relation qui générerait une « histoire » ?
J. B. — Non. En fait, chaque objet a pour moi sa petite histoire personnelle, mais indépendante de celle des autres. Je fais très peu de séries, du fait de ce parti-pris de conserver une forme originelle.

J. R. — Est-ce parce que, dans l’ensemble, ce sont des personnages ?
J. B. — Personnages, oui souvent, mais aussi animaux. C’est très varié.

J. R. — Mais l’humain ne prédomine-t-il pas ? Quand je vois, par exemple, votre tête de vache, je lui trouve un air très humain.
J. B. — Oui, parce qu’en fait, sa tête ressemble à un  masque. J’aime l’idée du masque, dans mes créations, les variations qui me permettent, lorsque la forme ne se suffit pas à elle-même, de faire des assemblages. Je prends alors ici des petits morceaux de métaux, là de la ficelle traitée, une passoire, et pour les nœuds, les protubérances, des branches de frênes que je fais pousser dans mon jardin…

J. R. — Vous dites : « Je récupère des objets… » Quelles qualités doivent avoir ces objets pour que vous les ramassiez. Et à quel moment vous vient l’idée de la façon de les utiliser ?
J. B. — Au moment de la découverte. Au moment du plaisir de la « rencontre ». Peu m’importe alors, l’état de l’objet, du moment que sa forme m’enchante.
Ensuite, l’assemblage dépendra de la manière dont se conjuguent les ajouts. Deux formes peuvent se rencontrer à des années de distance. Ce que j’essaie de faire, c’est de me tenir au sujet suggéré par la silhouette originelle.


J. R. — Parfois, pourtant, vous intervenez fortement sur la composition de la sculpture ?
J. B. — Il peut arriver, en effet, que le travail de sculpture soit plus important.

J. R. — Dans ce cas, comment reliez-vous ce travail très sophistiqué, très  poli, avec la définition que vous m’avez donnée au début de notre entretien ?
J. B. — Pour moi, il n’y a guère de différence. Tout est une question d’évidence de départ. Cette évidence conditionne l’importance de mon intervention, mais ne change pas l’esprit de ma sculpture.

J. R. — Vous avez dit à un moment qu’il n’était pas important que les matériaux que vous ramassiez témoignent du passage du temps. N’êtes-vous pas en décalage par rapport à vos collègues d’art-Récup’, (mais je devrais sans doute dire « accumulateurs », pour suivre la mode ?) qui, eux, aiment les objets burinés, patinés, brassés par les flots, etc. ? Ce qui est surprenant, c’est le « côté tout neuf » de votre création.
J. B. — J’ai en fait envie de donner aux matériaux une seconde vie, qu’ils aient été ou non précédemment usés. J’ai envie qu’ils paraissent neufs. Je n’arrive pas à garder les matériaux bruts. Il faut que je les ponce, que je les frotte… Je veux chasser justement les traces d’usure.

J. R. — Vous procédez donc à l’inverse des autres : vous oblitérez délibérément ce qu’ils recherchent sans arrêt.
J. B. — Oui, disons que je suis pour le « renouveau » ! Je n’aime pas ce qui est gris. Je recherche en fait, le vivant sous ce gris.

J. R. — J’ai lu dans votre curriculum que vous réalisez aussi des sculptures dans la neige. Qu’est-ce qui vous intéresse dans ces créations éphémères alors que vous voulez sans doute pérennes, vos sculptures en bois ?
J. B. — Oui, bien sûr. Mais il s’agit alors d’un travail de groupe. Et quand on est en montagne, on a un rapport presque ludique avec la neige. Ces créations sont en fait pour moi, des vacances qui me changent du travail solitaire auquel je suis habitué.



 

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  • : joël BRESSAND Glaneur-assembleur
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